Adepte de l’offensive, Sven Mary, l’avocat de Salah Abdeslam, l’est sûrement.
Mais comme quelques-uns de ses confrères, il est certainement plus adepte encore de la provocation.
 Les effets de manche, qui parfois sonnent comme des rodomontades, sont en effet la spécialité de certains membres de cette corporation, qui savent qu’en vertu de la mission sacrée qui est la leur – « défendre l’accusé » -, ils peuvent à peu près tout se permettre.
Tout cela, en temps ordinaire, peut prêter à sourire, voire à rire, selon que le spectacle est ou n’est pas de bonne qualité.

L’affaire Abdeslam, qui fait suite aux attentats terroristes de novembre 2015, sort cependant de l’ordinaire judiciaire que tout citoyen, belge, français ou autre, peut connaître habituellement.
 Elle est atypique par le nombre des victimes, par la barbarie dont ont fait preuve les auteurs de ces crimes, par le précédent qu’elle instaure en déstabilisant gravement nos démocraties et en instillant une peur durable dans les populations.
Dès lors, les postures habituellement observées et les propos souvent entendus parmi les membres du barreau peuvent prendre un autre sens et sonner comme des agressions qui viennent aggraver les traumatismes déjà subis.

Passe la menace de la plainte qui devait être déposée ce lundi par M. Mary contre le procureur de Paris, François Molins.
 En effet, il est reproché par l’avocat au magistrat d’avoir dévoilé, après l’arrestation du présumé innocent, une partie de son audition par les services enquêteurs.
Rappelons simplement à Me Mary que c’est le Code de procédure pénale français, en son article 11, qui permet au procureur de la République, « afin d’éviter la propagation d’informations parcellaires ou inexactes ou pour mettre fin à un trouble à l’ordre public… », de communiquer avec la presse.
 Soulignons au passage que, si l’avocat belge persiste, il devra également déposer plainte contre l’ensemble des médias qui couvrent cet événement depuis des mois, et communiquent régulièrement des informations qui ne devraient pas sortir des procédures.
Mais une plainte contre la presse risquerait d’être peu porteuse pour l’avenir…

En réalité, la violence des propos déplacés de Me Mary se trouve davantage dans le reproche qu’il fait à son pays « de s’agenouiller, de vivre sur ce sentiment de culpabilité qu’on semble avoir en Belgique vis-à-vis de la France, depuis les attentats ».

N’en déplaise à notre auxiliaire de justice, les victimes, françaises, n’avaient rien demandé à la Belgique.

Et surtout pas que le laxisme de ses gouvernants laisse se constituer, dans la banlieue bruxelloise, à seulement quatre heures de Paris, un véritable repère de terroristes.

Non, Me Mary, les Français ne demandent pas que l’on s’agenouille devant eux.

Ils attendent seulement, pour les victimes, un peu de respect.

Défendez donc votre tas d’or, c’est votre mission, mais avec dignité.